Le #graffeur #Seth à la Réunion pour un documentaire

Graf-rond-de-coq_JDM_171144SETH. Son visage ne vous est sans-doute pas inconnu. Julien Malland, plus connu sous le pseudo de “Seth”, est l’atout culturel de l’émission “Les Nouveaux Explorateurs”, diffusée chaque dimanche sur Canal +. Spécialiste du street art, ce “globe painter” a récemment posé ses bombes à La Réunion et à Madagascar pour tourner un documentaire (1)

Bio rapido de Seth, alias Julien MallandSon nouveau livre, “Extramuros”
Pourquoi avoir envie de tourner à La Réunion alors que l’émission “Les Nouveaux Explorateurs ? est habituellement consacrée aux pays étrangers ?

Je suis venu en mars à La Réunion et j’ai fait la rencontre d’artistes intéressants comme Jace ou Kid Kreol & Boogie. Ils m’ont parlé de leur influence malgache dans leur travail. Je trouvais donc logique de commencer mon documentaire par La Réunion, avant d’aller tourner en septembre à Madagascar.

Comment s’est passé votre séjour dans notre île ?

Très bien ! C’est une île que je connais car ma sœur y habite. J’ai été assez surpris par la richesse du street art et l’effervescence qui y règne actuellement. Ce n’est pas que du graffiti, il y a une vraie touche réunionnaise qui parle de la culture créole et du mythe de “Lémurie” C’est une légende selon laquelle il y aurait un continent englouti dont Madagascar et les îles Bourbon seraient les parties émergées.

Que retiendrez-vous de votre passage ici et à Madagascar ?

Ce qui m’a frappé c’est la contradiction entre les deux îles. À La Réunion, l’art urbain est devenu pour les jeunes un moyen de créer leur identité alors qu’à Madagascar, la culture graphique, comme ces peintures traditionnelles sur les tombeaux, est en train de se perdre. Il était intéressant pour moi de voir les origines de la culture réunionnaise et de montrer ce paradoxe : l’un va vers la recherche d’identité et l’autre vers la globalisation.

Où avez-vous laissé votre “empreinte” à La Réunion, comme vous le faites à chacun de vos tournages ?

On a tourné à Saint-Denis, Cilaos, Saint-Pierre et le Tampon mais j’ai très peu peint. J’ai fait un petit personnage avec Kid Kreol sur un rond de coq de Saint-Denis, comme si l’esprit du coq sortait de son esprit. Ce ne sera pas dans le film. J’ai aussi peint sur la case du grand père de Kid Kreol, qui risque d’être détruite, une personne couchée. L’idée était de parler de la perte d’identité créole, avec ce personnage qui en est le garant. Mais c’était difficile de peindre sur la tôle, il faut que je revienne à La Réunion pour faire de vraies peintures.

Ça fait quoi d’avoir le job que tout le monde rêve d’avoir ? Est-ce que c’est aussi idyllique que ça en a l’air ?

Oui (rires, ndlr), ça l’est ! Après, c’est aussi beaucoup de travail de préparation, de stress. Voyager, rencontrer des gens, c’est un vrai plaisir mais ce n’est pas toujours aussi facile que ça en a l’air.

Souvent, vous peignez des enfants recroquevillés ou endormis, qu’est-ce que cela signifie ? Faut-il voir une partie de vous dans ces personnages ?

Oui, c’est une partie de moi. C’est ma peur du monde (sur un ton ironique, ndlr) ! Mais ces enfants deviennent de plus en plus adolescents et ils vont bientôt devenir adultes. C’est pour moi un moyen de mettre un regard frais sur le monde. Car je peins dans des endroits historiquement chargés et socialement compliqués. Passer par le prisme de l’enfant, c’est porter un regard d’espoir que les adultes n’ont peut-être plus. J’essaie d’avoir une vision poétique du monde.

Vous avez choisi “Seth” pour pseudo, la personnification du mal dans la mythologie égyptienne, n’est-ce pas un peu contradictoire avec tous ces personnages inoffensifs, voire enfantins que vous dessinez ?

Seth est aussi quelqu’un qu’on vénérait pour sa force. L’idée c’est de montrer comment on utilise la mauvaise force pour la détourner en quelque chose de bon. Et puis le chiffre sept est aussi un porte-bonheur.

Avez-vous le sentiment que le street art est aujourd’hui considéré comme un art au même titre que la peinture ?

Oui, même si ce n’est pas toujours vendable, cet art marche bien aujourd’hui car on est dans une époque de buzz. Si les gens aiment, ils partagent très vite la photo sur les réseaux sociaux. On n’en vit pas forcément, mais pas moins que les autres artistes. C’est aussi normal, car 80 % des peintures murales sont inintéressantes et ne le méritent pas. En France, on ne gagne pas sa vie en peignant un mur, ce qui n’est pas le cas dans d’autres pays. Mais ça se vend sous forme de toile, en illustration et sous des dérivés. Il y a un vrai marché pour cet art. La base de notre travail est quand même de peindre gratuitement pour le partager au grand public.

Que faut-il retenir de votre travail ?

Ce que j’essaie de partager, c’est l’idée qu’avec l’art on peut communiquer entre les cultures et que ça contribue à lutter contre cette culture globalisante qui envahit le monde petit à petit. Si toutes ces créations qui ont des origines anciennes disparaissent, c’est un peu de notre âme qui meurt. C’est pour ça que je reprends les particularités culturelles de chaque pays dans mes peintures. Vue que la révolution n’est plus possible, ça peut faire rêver les gens et pousser leur imagination.

1) Tourné au mois de septembre à La Réunion, le documentaire sera diffusé dimanche 3 mars à 14 h 30 sur Canal + dans l’émission “Les Nouveaux Explorateurs”

Entretien : Marie Payrard source http://www.clicanoo.re

 

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